Vers une nouvelle scienceVahé Zartarianjuin 1996, révisé en mars 1997 |
Quelle est la nature de la réalité? Comment connaissons-nous? Quelle est la valeur de nos connaissance? Face à ces questions de base de l'épistémologie, la science actuelle semble en bien mauvaise posture. Tous les fondements sur lesquels elle s'est édifiée au fil des siècles s'avèrent d'une étonnante fragilité: la vérification expérimentale comme critère de réalisme, la possibilité d'isoler un système ou de répéter une expérience. Si tout cela s'écroule, que reste-t-il pour faire une science?
la science en crise / trois conceptions de la gravitation / observateur et observé / la répétabilité / vers une nouvelle science
Il ne fait guère de doute que, derrière les apparences d'un triomphe sans partage, la science traverse aujourd'hui une crise majeure. Les raisons en sont diverses.
D'abord, c'est indéniable, l'on constate dans nombre de domaines de magnifiques avancées, débouchant très concrètement sur des réalisations touchant notre quotidien. En physique, je ne prendrai que l'exemple du laser, devenu indispensable même pour écouter de la musique; en biologie, j'évoquerai juste les manipulations génétiques, dont les effets se retrouvent déjà dans nos assiettes, pour le meilleur ou pour le pire.
"Ca marche, donc c'est vrai" serait-on tenté de dire. Malheureusement, le revers de la médaille est que la compréhension semble régresser à mesure que la précision augmente! Malgré ses indéniables succès, force est d'admettre que la science ne sait toujours pas répondre à des questions aussi triviales que: qu'est-ce que la matière? qu'est-ce que l'espace? comment s'élabore la forme d'un organisme? qu'est-ce que la pensée, la conscience?
Certains veulent croire que ce n'est qu'une affaire de temps et de moyens: "donnez-nous les moyens de construire des accélérateurs de particules toujours plus gros, laissez-nous le temps de décrypter le génome des êtres vivants, et vous aurez les réponses". J'en doute. C'est justement le but de cet essai de montrer que le problème est beaucoup plus profond car il touche à la nature même de la science.
D'autres préfèrent penser que de telles questions ne relèvent pas de la science. Son rôle serait plutôt de donner aux hommes des moyens d'agir toujours plus efficacement sur le monde, pas de s'occuper de métaphysique. A cela je répondrai:
1. que ce sont bien des questions de ce genre qu'ont à l'esprit un grand nombre de chercheurs lorsqu'ils s'interrogent "scientifiquement" sur l'origine de l'univers, l'origine de la vie, l'évolution des espèce ou l'apparition de la conscience.
2. la vieille position thomiste, dans son dernier avatar qui prétend rendre incommensurable science et métaphysique, cette position a vécu. Des théories comme la relativité ou la physique quantique, ou bien l'étude des états modifiés de conscience, nous conduisent vers des frontières où nous ne pouvons éluder les questions fondamentales (1). L'univers est; la conscience est. Par conséquent toute expérience est une porte d'accès à ce-qui-est. L'on ne saurait séparer ce qui vient du dedans de ce qui vient du dehors, ni séparer le pourquoi du comment.
Dans le même temps, peu de scientifiques osent afficher leurs doutes. Beaucoup proclament même leurs certitudes avec une foi et un dogmatisme dignes des grands théologiens médiévaux. Cela donne des affirmations du genre: "toute la vie n'est qu'une danse moléculaire orchestrée par l'ADN"; "bientôt l'on aura une théorie de tout" (theory of everything ou TOE en anglais); "les phénomènes parapsychologiques n'étant pas permis par les théories actuelles, ils n'existent pas"
Et le grand public qui, il faut l'admettre, ne comprend rien à ces choses-là, essaie tant bien que mal de naviguer entre certitudes et doutes, entre superstitions et faits avérés. Il fait des scientifiques la référence incontournable lorsqu'il s'agit de savoir d'où vient l'univers (Big-Bang est devenu un nom commun), d'où vient l'homme (l'homme descend du singe évidemment!), ou bien lorsqu'il veut que l'on soigne ses maux. Mais dans le même temps, il ne se prive pas de transgresser les interdits de la science et de consulter à tour de bras voyants, astrologues, médiums et autres marabouts, ou de se faire soigner par des procédés d'une rigueur et d'une efficacité parfois plus que douteuses.
Bref, tout ça finit par faire une salade plus qu'indigeste. D'innombrables pratiques, plus juteuses que justes, se voient sans critique affublées du qualificatif de "scientifiques" pour acquérir un semblant de respectabilité. Et les crédules, heureux de décharger leur responsabilité sur l'extérieur, se ruent avec ardeur et délice sur ces monceaux d'opinions frelatées, qui ont tout de même l'avantage de calmer pour un temps leurs angoisses.
On voit aussi des conclusions extravagantes tirées de travaux scientifiques plus ou moins bien fondés. De simples hypothèses sont portées au rang de théories établies et se trouvent investies du pouvoir de tout expliquer: la matière, la vie, la conscience, la disparition des dinosaures, que sais-je encore. Le mental a tôt fait de s'en emparer, trop heureux d'avoir enfin un modèle simple qui rende compte de tout.
Il n'est pas dans mon propos de critiquer telle ou telle pratique particulière, ni telle ou telle théorie. Je laisse à chacun le soin de mettre des noms au regard des catégories dont je viens grossièrement de tracer les contours. Je préfère donner quelques éléments de réflexion qui puissent servir de garde-fous aux généralisations abusives et aux pratiques nocives. Car il ne saurait être de science sans épistémologie, c'est-à-dire sans ces indispensables fondations que constituent les réponses à ces questions: que connaît-on? comment connaît-on? quelle est la valeur de nos connaissances? Je voudrais dans cet essai donner quelques pistes pour aborder ces questions, et en tirer les conséquences qui s'imposent pour fonder la science sur des bases plus saines.
La gravitation, voilà une chose que nous connaissons tous fort bien, même si nous n'avons pas forcément les mots ni les formules mathématiques pour l'exprimer. C'est elle qui nous donne un poids, qui fait retomber un objet lancé en l'air, qui fait que la Lune tourne autour de la Terre, et la Terre autour du Soleil
Newton est le premier qui a su réduire cette variété de phénomènes à une formule mathématique simple. On se souvient tous avoir appris à l'école qu'il eut la révélation de la gravitation en voyant tomber une pomme tandis qu'il se reposait sous un arbre. En fait, ce qu'il réalisa à cet instant, c'est que la cause qui provoquait la chute de la pomme et celle qui maintenait la Lune sur son orbite étaient identiques.
Que l'anecdote soit vraie ou pas importe peu. D'une manière ou d'une autre, Newton eut cette géniale intuition qui lui permit d'unifier la physique céleste et la physique terrestre en un ensemble de lois simples. Après avoir mis au point un nouvel outil mathématique, le calcul différentiel, après avoir établi les concepts de base de la dynamique, il fut en mesure de déduire des lois de Kepler celle plus générale de la gravitation universelle: "deux corps massifs s'attirent en raison directe de leur masse et en raison inverse du carré de leur distance".
Pour connaître le mouvement d'un corps de masse m (disons une planète pour fixer les idées) par rapport à un corps de masse M (le Soleil), il suffit de savoir qu'il est soumis à une force F dirigée vers lui et d'intensité F=KmM/r^2 où K est une constante et r la distance qui les sépare:
Quelques manipulations mathématiques simples, et le tour est joué: connaissant la position et la vitesse de la planète à un instant donné, on peut calculer sa position à tout autre instant du passé ou du futur.
Ce sur quoi je voudrais insister, ce ne sont pas ces calculs, mais la vision du monde qui est sous-tendue par cette expression de la gravitation. Dans cette loi de Newton, il est dit que le mouvement d'un corps massif est déterminé par la présence d'une autre masse à une certaine distance de lui. Autrement dit, les objets sont caractérisés par une masse, et leurs mouvements dans l'espace sont dus à une force qui s'exerce à distance, l'attraction gravitationnelle.
On pourrait croire que tout est dit. Mais, pour surprenant que cela paraisse, il y a une manière complètement différente d'exprimer cette loi de la gravitation, avec la notion de champ qui remplace celle de force. Comme c'est un peu plus compliqué, je vais essayer de rendre les choses simples en faisant un petit détour par le magnétisme.
Il y a une expérience classique qui consiste à placer une feuille de papier au-dessus d'un aimant, à saupoudrer de la limaille de fer dessus, et à tapoter sur les bords. On voit alors la limaille s'ordonner pour dessiner de superbes courbes qu'on appelle des lignes de force magnétique:
On sent bien que ces lignes doivent exister même en l'absence de limaille. C'est pourquoi l'on parle de champ magnétique. Il imprègne chaque point de l'espace, où il est caractérisé par son intensité et sa direction, que révèle la ligne de force. En d'autres termes, on ne considère pas que l'aimant exerce une force sur chaque particule de fer; on considère qu'il emplit tout l'espace d'un champ magnétique et que c'est la valeur de ce champ en chaque point qui détermine le mouvement des particules.
De même, dans un espace comportant des objets massifs, il est possible d'associer à chaque point un nombre, qu'on appelle le potentiel gravitationnel. La grande différence avec la première conception, celle de force, est que pour calculer le mouvement d'une masse, on n'a pas besoin de connaître ce qui se passe au loin; il suffit juste de savoir comment le potentiel varie dans le voisinage immédiat de la particule. Mais je préfère laisser la parole au grand physicien Richard Feynman, qui explique cela mieux que moi: "On a un nombre en chaque point de l'espace, et ce nombre change d'un point à un autre. Si vous placez un objet en un certain point, il est soumis à une force dans la direction où ce nombre change le plus rapidement. Je donne à ce nombre son nom habituel, le potentiel. La force est donc dirigée dans la direction où le potentiel change le plus rapidement. De plus la force est proportionnelle au taux de variation du potentiel d'un point à un autre."(2)
Alors que dans la vision newtonienne le déplacement d'un corps massif d'un instant à l'autre dépend de ce qui se passe à une certaine distance, dans la vision du champ, il ne dépend que de ce qui se passe dans son voisinage immédiat. Dans le premier cas, l'espace est une structure quasiment vide, occupé seulement localement par des masses qui exercent les unes sur les autres une attraction à distance; dans le second cas, l'espace est complètement "rempli" par le champ gravitationnel (3). Il est important d'ajouter que calculer un déplacement en utilisant la force ou en recourant au champ donne rigoureusement les mêmes résultats. Mathématiquement, les deux procédés sont parfaitement équivalents, et il est facile de les faire dériver l'un de l'autre. Mais en termes de vision du monde, on constate que les choses sont très différentes.
Pour faire un tour à peu près complet de la question et bien montrer la profondeur du problème, je tiens à évoquer une manière encore plus bizarre de calculer le mouvement d'une particule massive. Ce troisième point de vue sur la gravitation va nous éloigner encore plus d'une représentation naïve de la matière. Il n'y est plus question de mouvement déterminé de proche en proche, que ce soit sous l'effet d'une force ou sous l'effet d'un champ. On considère maintenant le mouvement globalement, comme un tout. On considère même une infinité de mouvements possibles, parmi lesquels le mouvement réel se distingue par une caractéristique très particulière. Tout ceci est assez compliqué, j'en conviens, et il faut dire que les plus grands mathématiciens des 18 et 19ème siècles ont contribué à ces développements: Euler, Lagrange, Laplace, Jacobi, Hamilton pour ne citer qu'eux. Je vais tout de même essayer de rendre cela compréhensible.
Supposons que parmi tout un ensemble de masses, un certain objet X "veuille se déplacer". A priori, il existe une infinité de trajectoires possibles, comme le suggère la figure 3.
Pour chacune d'elle, on calcule une certaine grandeur physique, ce qui donne à chaque fois un nombre différent. Et bien l'étonnant est que la trajectoire réelle suivie par l'objet est celle pour laquelle cette grandeur est la plus petite. On dit que le mouvement est régi par le principe de moindre action. (4)
Ce bref aperçu du principe de moindre action semble conduire à des développements exagérément compliqués par rapport à la belle simplicité de la formule de Newton. Or il faut savoir que d'un strict point de vue mathématique, tout ceci est rigoureusement équivalent. De plus, derrière son apparente complexité, ce formalisme s'avère beaucoup plus souple d'emploi que celui de Newton, particulièrement lorsqu'il s'agit de traiter simultanément un grand nombre de particules (mécanique statistique). Seulement, la vision du monde sous-tendue est encore une fois radicalement différente. Plus question de force à distance ni de potentiel local. Cette fois, c'est comme si l'objet explorait de manière virtuelle toutes les trajectoires possibles pour ne réaliser effectivement que celle qui minimise la grandeur évoquée.
Récapitulons.
Nous avons trois formulations d'une même théorie qui sont mathématiquement équivalentes. Mais chacune est sous-tendue par une vision du monde différente. Conclusion: on est complètement incapable de dire à quoi ressemble le monde à partir de lois physiques même parfaitement vérifiées expérimentalement!
La théorie classique de la gravitation a largement fait ses preuves depuis trois siècles. Mais on ne sait pas si elle est vérifiée parce que des forces s'exercent à distance entre des masses, ou parce que toute masse est à l'origine d'un champ qui emplit tout l'espace, ou encore parce que chaque particule à chaque instant explore toutes les possibilités de mouvement et réalise effectivement celle qui minimise son action. Et entre ces différentes façon de voir, rien ne permet de trancher parce qu'elles conduisent aux mêmes conséquences observables!
Parvenu à ce point, on pourrait arguer que la théorie classique de la gravitation est aujourd'hui supplantée par les théories relativistes et quantiques. En fait cela n'enlève rien au raisonnement que je viens de tenir. Car ces théories admettent elles aussi plusieurs formulations mathématiquement équivalentes mais qui impliquent des visions du monde radicalement différentes. Pour ne prendre que l'exemple de la physique quantique, il faut savoir que dès l'origine elle a pris deux formes différentes (5). Schrödinger énonça la fameuse équation qui régit le comportement des "ondes-corpusules", et de son côté, Heisenberg développa la "mécanique des matrices". L'animosité entre les tenants de l'un et les tenants de l'autre était forte, jusqu'à ce que Dirac montre l'équivalence mathématique des deux théories.
Plus près de nous, David Bohm a proposé une formulation encore différente qui fait appel à un potentiel quantique (6). La signification de ces termes a peu d'importance ici. Ce qui compte, c'est de savoir que les prédictions physiques faites par ces différentes théories sont en tous points identiques. En revanche, les hypothèses qui les sous-tendent concernant la nature du réel sont complètement différentes.
Par conséquent, on ne saurait se servir d'aucune théorie physique, même amplement validée par l'expérience, pour dire que l'univers est fondamentalement fait de ceci ou de cela: d'énergie, de vibrations, de champs quantiques, de champs morphiques ni quoi que ce soit d'autre. Et si cela vaut pour cette branche la mieux fondée de la science qu'est la physique, on imagine ce qu'il peut en être dans les branches plus "molles", dont on se demande même si elles méritent le nom de science tant elles se rapprochent parfois de bavardages inconsistants (je ne citerai pas de noms pour ne vexer personne!).
Gardons-nous donc de prendre la science au premier degré comme alibi à notre paresse épistémologique et métaphysique. Elle a certes d'irremplaçables services à nous rendre dans ces domaines, mais à condition de la prendre comme il convient, avec doigté, faute de quoi l'on se fourvoie. Ceci n'enlève rien à sa valeur. C'est juste la remettre à sa place. La science, ou du moins la science telle qu'elle est conçue aujourd'hui, est avant tout un outil pratique: si j'observe à l'instant t la situation A dans le monde physique (pour faire la distinction avec les pures états mentaux), alors en appliquant la théorie T, je puis raisonnablement penser que j'observerai A' à l'instant t'. Voilà tout. Bien sûr, n'importe quelle théorie peut inspirer des généralisations. Mais elles demandent toujours à être validées par l'expérience, et pas justifier des débordements affectifs parce qu'elle a quelques bons résultats à son actif.
Revenons une dernière fois sur la gravitation. On sait maintenant:
Or on n'imagine pas une planète faisant le point à chaque instant pour évaluer sa position, les forces qui s'exercent sur elle, et calculer ainsi sa trajectoire! Elle semble mener sa vie sans trop se poser ce genre de questions.
Finalement, le plus mystérieux dans cette affaire est que malgré ses imperfections, malgré la distance qui la sépare de la réalité, la théorie fournit des prédictions plutôt bien vérifiées, comme les éclipses. Cela signifie que la science a quand même quelque chose à nous dire à propos de ce-qui-est. Seulement, c'est d'une manière plus subtile qu'on ne l'imaginait de prime abord. J'essaierai d'en donner quelques illustrations dans les prochains essais. Mais avant d'en arriver là, j'aimerai poursuivre l'examen critique de la science actuelle et montrer la fragilité d'un autre de ses fondements, l'expérience.
La science expérimentale s'est construite sur l'hypothèse qu'il est possible d'isoler un système, c'est-à-dire de réduire les interactions aux seules que l'on désire étudier et rendre négligeables les autres. En d'autres termes, cela signifie que si l'on enferme des particules ou des microbes dans une boîte, l'évolution du système va dépendre surtout de ce qui se passe dans ladite boîte, et pas de gesticulations à l'autre bout de la planète ou de la galaxie, ni de ce que l'observateur a dans la tête lorsqu'il regarde dedans (7). Or un certain nombre de réflexions et d'observations conduisent à douter sérieusement de la validité de ce postulat. Par exemple:
Le physicien Michaël Berry s'est livré à une intéressante expérience de pensée. Il s'est demandé ce qui se passerait dans une enceinte emplie de gaz si l'on ôtait subitement l'attraction gravitationnelle d'un électron placé à la limite de l'univers connu (8). Plus précisément, il a cherché à savoir combien de temps il faudrait pour qu'un changement qualitatif intervienne dans la trajectoire des molécules. Il a trouvé que ce temps est égal au temps nécessaire pour qu'une molécule fasse une cinquantaine de collisions avec d'autres molécules, soit une infime fraction de seconde. (9)
Il est intéressant de mettre ceci en regard d'une autre réflexion, issue elle de la théorie du chaos. Il s'agit du fait que la grande majorité des systèmes naturels présente une hypersensibilité aux conditions initiales. Cela signifie que d'infimes perturbations peuvent suffire à déclencher des bouleversements de grande ampleur. En météo par exemple on parle d'effet papillon pour dire que le battement des ailes d'un papillon est susceptible de déclencher un ouragan à l'autre bout de la planète. J'y reviendrai. Mais pour l'instant, cela suffit pour dire que l'existence de "systèmes isolés" devient difficilement admissible dans le cadre de la physique classique. Et l'on va voir qu'avec la microphysique, les choses ne s'arrangent pas, loin de là.
Depuis l'avènement de la physique quantique, on est confronté à une foule de phénomènes tous plus étonnants les uns que les autres. Il apparaît en particulier qu'observateur et chose observée forment une totalité indissociable. Il n'y a pas d'un côté un système qui évolue indépendamment de tout le reste, et de l'autre un observateur qui se contente de regarder passivement ce qui se passe. Une expérience est un acte global qui fait intervenir tant l'observateur que la chose observée. Ceci renvoie à une question très délicate qu'on appelle en physique quantique le problème de la mesure. J'y reviendrai dans l'essai suivant intitulé La Lyse. Mais pour en avoir dès maintenant un avant-goût, voici un exemple fort instructif.
Supposons que l'on veuille connaître avec précision la vitesse et la position d'une particule, disons un électron, pour être en mesure de suivre son évolution ultérieure. On commence par mettre en place un dispositif qui permet d'obtenir sa position avec une précision d'un millième de millimètre. Forts de notre expérience avec des objets macroscopiques comme des voitures ou des fusées, on est tenté de penser que la mesure de la vitesse avec une aussi grande précision ne va pas poser de difficultés. Or c'est en fait là que les ennuis commencent. Il se trouve que de quelque manière que l'on prenne le problème, on est dans l'incapacité de connaître la vitesse avec une précision supérieure à 100 mètres par seconde (10). Cela veut dire que dans la seconde qui suit, l'électron peut se trouver n'importe où dans un rayon de 100m!
Pour ne pas tomber dans le travers dénoncé dans la première partie, je tiens à préciser que ceci ne découle pas d'un formalisme particulier de la physique quantique, ni de telle ou telle interprétation. Certains pensent que l'acte d'observation perturbe la particule, d'autres que l'incertitude est une propriété de la particule elle-même, d'autres encore qu'une particule quantique est une chose incompréhensible pour laquelle les notions classiques de vitesse et de position n'ont pas de sens Ces querelles d'interprétation ne nous avancent pas à grand chose.
Ce qui est sûr en revanche, c'est que quelle que soit la manière dont on s'y prenne, on n'arrive jamais à mesurer simultanément et avec une précision arbitraire deux paramètres conjugués comme la vitesse et la position. D'où il résulte que l'observation n'est nullement un processus passif mais qu'au contraire observateur et observé sont inextricablement liés.
Lorsqu'on passe de la physique à la biologie, le caractère indissociable de l'observateur et de l'observé apparaît encore plus flagrant. Comme c'est beaucoup plus accessible, je prendrai juste quelques exemples.
Tout le monde connaît l'effet placebo, grâce à quoi une substance anodine comme l'eau ou le sucre acquiert toutes les vertus thérapeutiques d'un médicament, y compris parfois ses effets secondaires. On pourrait s'attendre à ce qu'un "vrai" médicament, laborieusement mis au point par de vastes équipes de chercheurs, exerce une action thérapeutique dans près de 100% des cas, tandis qu'un placebo n'ait qu'une action marginale sur quelques sujets bien disposés. On pourrait s'attendre aussi à ce que le placebo agisse surtout dans des affections bénignes, où l'élément psychologique joue un rôle prépondérant, comme l'anxiété. Or il n'en est rien. L'efficacité du placebo est très étendue. Elle varie entre 15 et 80%, avec une moyenne qui pourrait se situer aux alentours de 60% selon des estimations récentes (11). Ce n'est guère inférieur aux performances réalisées par de "vrais" médicaments (il n'est d'ailleurs pas rare que des placebos donnent de meilleurs résultats que des médicaments!).
Qu'est-ce donc qui agit? Est-ce la substance chimique, la conviction du patient, un mélange des deux, ou bien autre chose encore? Pour montrer combien tout cela est subtil, voici une histoire vraie qui s'est déroulée aux Etats-Unis dans les années 50 (12).
Un patiente affligée d'un asthme rebelle à tout traitement se décide à aller consulter un nouveau praticien. Cela tombe bien, car il lui annonce la sortie prochaine d'un médicament aux effets prometteurs. L'espoir renaît. D'un commun accord ils décident de l'essayer avant sa commercialisation. Le laboratoire accepte de faire parvenir au médecin quelques échantillons, et le traitement commence. Les résultats sont immédiats: la patiente a l'impression de revivre. Consciencieux, le médecin décide de pousser l'expérimentation un peu plus loin. Il commande au laboratoire des comprimés de placebo en tous points identiques extérieurement au remède contre l'asthme. Il donne à sa patiente alternativement le vrai médicament et le placebo. Au bout de quelques temps, les résultats tombent, sans équivoque: seul le vrai médicament agit. Magnifique preuve d'efficacité, n'est-ce pas? Sauf que le médecin reçoit alors un courrier du laboratoire l'informant qu'une erreur a été commise: tous les produits qui lui ont été livrés étaient des placebos!
Qu'est-ce qui a agi? La conviction de la patiente? Sans doute, mais d'une manière fort subtile car elle croyait toujours recevoir un vrai médicament, tandis que le médecin croyait donner alternativement le médicament et le placebo. C'est sa croyance qu'il semble avoir transférée sur sa patiente puisque tout n'était que placebo. Autrement dit, dans de telles situations expérimentales, il n'y a pas de ligne de démarcation nette entre l'observateur et le sujet de l'expérience. L'expérimentation constitue un tout indissociable dont l'observateur ne saurait s'extraire.
Des observations un peu du même ordre ont été faites sur des animaux. Il s'agissait plus précisément d'animaux de laboratoires auxquels étaient inoculées des maladies. Il apparut au bout d'un moment qu'un groupe présentait des symptômes bien moins graves qu'un autre. Pourtant les animaux étaient issus de la même souche, étaient infectés par les mêmes microbes, recevaient les mêmes traitements, la même nourriture, vivaient dans des conditions identiques. Bref, aucune différence notable, sinon que ce n'était pas la même personne qui s'occupaient d'eux. Celle en charge du groupe présentant des symptômes atténués témoignait aux animaux de l'affection, leur parlait, leur donnait une caresse de temps en temps, et cela suffisait pour modifier les résultats de l'expérience!
Un effet semblable se manifeste avec les plantes. On remarque que certaines personnes peuvent planter pratiquement n'importe quoi dans n'importe quelles conditions, la plantes pousse. On dit qu'elles ont la main verte. Avec d'autres en revanche, rien n'arrive à pousser, même si les règles de l'art sont scrupuleusement respectées.
Pour clore cette série d'exemples, je citerai une expérience réalisée par Carroll Nash dans les années 80. Elle concerne la fameuse bactérie Escherichia coli. Celle-ci existe sous deux formes: "lac-négative" qui ne peut se nourrir de lactose, et "lac-positive" dont le métabolisme l'admet. Les deux formes mutent librement l'une dans l'autre et sont faciles à distinguer.
Une suspension des deux formes également représentées fut préparée. On la répartit dans 60 tubes à essais qu'on distribua à des étudiants en leur demandant d'obtenir davantage de lac-positives ou davantage de lac-négatives. Ils devaient se borner à projeter cette intention pendant une dizaine de minutes devant le tube sans le toucher. Après quelques manipulations techniques dont je passerai les détails et comparaison avec des lots témoins, on obtint les résultats. Ceux-ci se révélèrent statistiquement significatifs, c'est-à-dire que ceux qui devaient obtenir davantage de lac-positives en avaient effectivement plus en moyenne, avec des taux qui dépassaient le simple hasard, et de même ceux qui devaient obtenir davantage de lac-négatives.(13)
Je sais que ce genre de phénomène est encore loin d'être admis par la communauté scientifique qui le qualifie de parapsychologie (ou plutôt cherche à le disqualifier). Je n'entamerai pas de polémique à ce sujet. Je dirai seulement que ceux qui ont des yeux, des oreilles, et un cerveau s'en servent pour regarder, pour écouter, et se faire leur propre opinion, et qu'ils se souviennent qu'il n'est de pire sourd celui qui ne veut entendre.
En biologie comme en physique, l'observateur apparaît de plus en plus indissociable de ce qu'il observe. Certes, on trouve aujourd'hui de nombreux chercheurs qui sont prêts à en convenir. Malheureusement, cela dépasse rarement le niveau du discours, et en pratique il n'y a guère d'incidences. Presque tout le monde continue de faire "comme si" l'observateur était passif et neutre. Et cela vaut autant pour les sciences qui se prétendent officielles que pour celles qui tentent de le devenir, notamment certaines pratiques médicales dites "alternatives". Les habitudes ont la vie dure! C'est d'autant plus grave qu'on touche à la santé des gens, qu'on joue avec leurs sentiments, leurs angoisses, leurs détresses. Il devient de plus en plus inacceptable d'entendre des propos du genre: "j'ai fait prendre telle substance à untel et il se porte mieux, donc cette substance est active pour cette maladie"; "j'ai fait écouter de la musique à un plant de patate et il pousse mieux, donc cette musique favorise la croissance des patates" Est-ce vraiment le médicament ou la musique qui agit? Ou n'est-ce pas plutôt l'intention de celui qui conduit l'expérience? Tant que ces questions ne sont pas explorées à fond, on ferait mieux de s'abstenir de tirer des conclusions aussi tranchées.
Derrière ce problème observateur-observé s'en cache un autre qui est celui de la répétabilité d'une expérience, autre présupposé de la méthode expérimentale classique. Car pour construire une loi de portée générale, il faut disposer d'un ensemble cohérent de données, qui proviennent de la répétition de la même expérience, avec des variations contrôlées. Cela suppose donc qu'une expérience refaite dans les mêmes conditions donne des résultats identiques, ou du moins très proches. Une fois encore, cela semble raisonnable. Mais quand on y regarde de plus près, on se rend compte que cette notion est elle aussi battue en brèche, et ce de plusieurs manières.
D'abord, on vient de le voir, si l'on délimite un bout d'espace qui contient le système que l'on désire étudier, les paramètres qui régissent son évolution ne peuvent pas être confinés dans ces limites, quelles que soient les précautions prises. Au bout du compte, son évolution dépend de l'univers entier. Et comme celui-ci change à chaque instant, la stricte répétition d'une expérience est impossible.
Elle est non seulement impossible, elle est incontrôlable. Car l'on pourrait se dire: "l'évolution de mon système dépend certes d'une foule de paramètres, mais la plupart sont négligeables". Or ce n'est pas vrai du tout. On a vu par exemple que la disparition subite d'un électron à l'autre bout de l'univers peut avoir des conséquences d'ampleur notable ici, sur Terre. Or il faut bien avouer qu'on ne sait pas du tout ce qui se passe à l'autre bout de l'univers!
Pour ne rien arranger, il faut savoir que même si l'on parvenait à tenir sous contrôle tous les paramètres, on continuerait de buter sur un obstacle incontournable qui signe la ruine définitive de la répétabilité. Il s'agit de la nature chaotique de pratiquement tous les systèmes naturels, plus précisément de la sensibilité au conditions initiales. Cela signifie qu'un écart infime sur les conditions initiales peut aboutir à des écarts très importants sur le résultat final. Si, par exemple, on pose côte à côte deux grains de poussière sur la surface d'une rivière, on pourrait s'attendre à ce que, au bout de quelques jours, ils ne soient certes plus si proches mais au moins séparés par une distance raisonnable, disons quelques mètres. En fait il n'en est rien parce que l'écoulement d'une rivière est un système chaotique. Par conséquent, il y a de grandes chances que les trajectoires divergent rapidement, de sorte que l'un des grains se retrouve bloqué indéfiniment dans un tourbillon tandis que l'autre rejoint la mer. La proximité initiale s'est complètement perdue en cours de route.
On découvre aujourd'hui qu'un nombre croissant de systèmes présentent cette nature chaotique. Ils sont la règle et non pas l'exception. Concrètement, cela se traduit par le fait que si l'on a au départ une infime imprécision sur la valeur d'un paramètre, par exemple sur le sixième chiffre après la virgule, l'imprécision sur le résultat final risque d'être d'un facteur incomparablement supérieur, cent, mille, voire un million, et non pas confinée aux chiffres après la virgule. La répétabilité comme critère de preuve devient par conséquent totalement intenable, sauf à renvoyer à des lois de nature chaotique.
Comment se fait-il qu'on ait pu tout de même construire une science sur cette base? Par exemple, on sait aujourd'hui que le système solaire est chaotique. Pourtant cela n'a pas empêché Kepler de trouver les lois qui portent son nom ni Newton d'en tirer sa fameuse loi de la gravitation universelle. Deux remarques suffiront pour toucher aux aspects essentiels de cette question.
Dans les sciences qui se sont développées en appliquant le critère de répétabilité, on n'a pas éliminé le chaos. On a juste fait émerger des phénomènes qui sur une certaine échelle de temps présentent une relative stabilité. Ces phénomènes sont peu nombreux. C'est pourquoi les grandes théories de portée générale sont rares. Je citerai la physique classique, l'électromagnétisme, la relativité et la physique quantique. Presque tout le reste, de grands pans de la physique, mais aussi la biologie, la psychologie, etc., se rapproche souvent plus de la cuisine ou de la dissertation philosophique que de la science à proprement parler. Ce n'est certes pas inutile, mais cela n'a pas la beauté ni la force ni la précision des théories "sublimes" citées plus haut (14).
D'autre part, il est une pratique courante en science qui consiste à éliminer les résultats les plus extrêmes. Au lieu de chercher à comprendre d'où ils sortent, on les jette immédiatement à la poubelle, les jugeant aberrants. Cela permet de faire rentrer les résultats dans le joli petit moule de la répétabilité, et donc de la respectabilité. Et l'on achève de noyer le poisson en compilant de savantes statistiques. On peut ainsi affirmer que tel médicament produit un certain effet sur, disons, 60% de la population testée. Mais on est incapable de dire l'effet qu'il va avoir sur tel individu particulier. Dire qu'il a 60% de chances de le guérir est évidemment une totale absurdité. C'est comme si l'on disait que le Soleil a 60% de chances de se lever demain à l'est!
La conclusion de tout ceci est claire: la répétabilité n'est en rien un fondement valable de la méthode expérimentale. Il est intéressant de remarquer que pour parvenir à cette conclusion, je n'ai eu à faire appel ni à l'indéterminisme de la physique quantique, qui est beaucoup plus profond que dans la théorie du chaos, ni à la dimension créatrice de la conscience. Je vous laisse imaginer ce que cela donnerait si l'on mettait tout ça ensemble
Lorsqu'on contemple l'histoire de la science moderne avec un regard d'épistémologue, on ne peut s'empêcher de penser que la plupart des phénomènes stables et répétables ont été identifiés et explorés. D'où les succès de la physique et la formulation de lois "sublimes". On peut penser aussi que si dans d'autres domaines on bute depuis tant d'années sur des obstacles apparemment infranchissables, c'est que la méthode n'est peut-être pas appropriée: qu'est-ce que la vie? qu'est-ce que la pensée? qu'est-ce que la conscience? On spécule beaucoup mais on n'est guère avancé.
J'ajouterai qu'en physique aussi la méthode semble avoir atteint ses limites. L'obstacle majeur qu'elle ne parvient pas à franchir depuis maintenant plusieurs décennies est la profonde incompatibilité entre la théorie de la relativité et la physique quantique. On dit même qu'elles sont incommensurables parce que les axiomes et les concepts de base de l'une ne peuvent être formulés dans le langage de l'autre: la relativité est fondée sur la continuité, le déterminisme, la localité et le réalisme, tandis que l'univers de la physique quantique est discontinu, indéterminé, non-séparable, et n'admet pas le réalisme. Chacune est évidemment bien vérifiée dans son domaine. Mais chaque fois qu'on essaie de les réunir, et ce n'est pas faute d'essayer, on aboutit à des assemblages pas très cohérents. (15)
Bref, si l'on veut garder les acquis de la science, car il ne s'agit pas de jeter le bébé avec l'eau du bain, mais si l'on veut aussi dépasser les blocages et les contradictions actuels, il n'y a guère selon moi qu'une solution: lui donner de nouveaux fondements épistémologiques.
La science classique s'est édifiée pour une bonne part sur l'idée que le monde existe au-dehors et indépendamment de la conscience, et que l'homme en est l'observateur passif. Cette idée est aujourd'hui sérieusement remise en cause, comme on vient de le voir. On commence même à pressentir quelques pistes qui pourraient servir à la remettre d'aplomb:
Il s'agit maintenant de mettre tout ça ensemble, et s'en servir pour dévoiler l'univers à l'aide de ce nouveau regard. Quelle science en sortira? Ce n'est pas encore très clair mais j'essaie de donner quelques pistes dans les autres essais. En tout cas il est évident pour moi que la science n'est pas seulement un outil pratique destiné à nous apporter plus de maîtrise sur le monde matériel et plus de confort. Le but de la science est d'abord et avant tout de chercher des réponses aux questions qui nous obsèdent, à contribuer à donner un sens à notre existence. Car la science nous dit toujours quelque chose à propos de ce-qui-est, même si c'est de manière subtile et qu'il nous appartient de démêler l'écheveau. Les anciens l'avaient compris, qui ne séparaient pas la science de la métaphysique de la spiritualité. Car les mystères de la matière ne sont jamais que ceux de notre conscience, ceux de La Création. C'est pourquoi il nous faut dans un double mouvement descendre en ses tréfonds et s'élever dans notre coeur. Car l'essentiel est de nous révéler à notre propre grandeur, et donner cela en offrande à tous les hommes, à tous les êtres. Telle est selon moi la science de demain, qui aide l'homme à grandir en même temps qu'elle le révèle.
1. Cf. Nos pensées créent le monde de Martine Castello et Vahé Zartarian (Laffont 1994), qui propose une nouvelle métaphysique à partir d'une réflexion sur les sciences de pointe.
2. Richard Feynman, La nature de la physique, Points-sciences. Ses réflexions m'ont beaucoup inspiré pour toute la partie de cet essai concernant la gravitation.
3. Einstein dans la relativité générale poussera ce second point de vue encore plus loin puisqu'il fera en sorte que la géométrie de l'espace-temps soit façonnée par le champ gravitationnel.
4. D'une manière un peu plus rigoureuse, on définit le lagrangien L=T-U où T est l'énergie cinétique et U l'énergie potentielle. Entre deux instants t1 et t2, on considère l'intégrale pa rapport au temps du lagrangien, appelée action hamiltonienne. Le principe de moindre action stipule que la trajectoire réellement suivie est celle qui minimise cette intégrale d'action, ce qui se traduit par dA= 0 .
5. Je parle bien ici de formulations différentes et non pas d'interprétations différentes d'un même formalisme. Ces dernières concernent une question un peu différente qui embarrasse la physique quantique depuis le début et qui s'appelle le problème de la mesure.
6. David Bohm, Wholeness and the implicate order, Routlege and Kegan, 1980.
7. Claude Bernard disait à ce propos dans son Introduction à la médecine expérimentale: "L'observateur doit être le photographe des phénomènes, son observation doit représenter exactement la nature. Il faut observer sans idée préconçue; l'esprit de l'observateur doit être passif, c'est-à-dire se taire; il écoute la nature et écrit sous sa dictée."
8. Pour information, la masse d'un électron au repos vaut environ 9,1.10^-31kg , et la taille de l'univers est estimée à 15 milliards d'années-lumière.
9. Cité par David Ruelle dans déterminisme et prédicibilité, numéro spécial de Pour la Science, l'ordre et le chaos.
10. Cela résulte des relations d'incertitude d'Heisenberg, dont une des formulations est: dx dp > h/2pi , où dx est l'incertitude sur la position, dp l'incertitude sur la quantité de mouvement, et h la constante de Planck.
11. D'après des travaux réalisés par la Scribbs Foundation en Californie, cité dans l'article l'effet placebo, Science et Avenir n°567, mai 1994.
12. Travaux de Wolf, cité par Marie Borrel et Ronald Mary dans l'envie de guérir, Belfond 1989.
13. Exemple cité par Rémy Chauvin dans la biologie de l'esprit, éditions du Rocher 1985 ; pour d'autres exemples du même genre, voir Mario Varvoglis, La rationalité de l'irrationnel, Interéditions 1992.
14. J'emprunte le terme à Penrose; dans l'esprit, l'ordinateur et les lois de la physique (interéditions 1992), il propose de distinguer trois grandes catégories: les théories SUBLIMES, les théories UTILES, et les théories PROVISOIRES; il voulait ajouter les théories MALENCONTREUSES, mais il s'est ravisé pour ne pas perdre ses amis!
15. Voir en particulier les remarques très pertinentes de Marceau Felden, dans Le modèle géométrique de la physique, Masson 1992.
16. Dans la lumière d'un cristal (Laffont, 1995), le jeu de la création (les éditions de 3 monts, 1997).
17. Par exemple Stanislav Groff, Royaumes de l'inconscient humain (éditions du Rocher), ou Jeremy Narby, Le serpent cosmique (Georg, 1996).