musiques de sons au saxophoneVahé Zartariannovembre 2009 |
Cet article expose le cheminement qui m'a conduit à la découverte de nouvelles techniques de jeu ainsi que des transformations sonores réalisées en direct avec des processeurs d'effets pour réaliser des musiques de sons au saxophone. Il prolonge et complète ces autres pages:
Comme expliqué dans le livre
mentionné ci-dessus, mon
but est de créer des musiques qui ne soient plus basées sur la
note mais sur le son. Cela signifie notamment :
- qu’il ne s’agit plus de raconter des histoires dans des langages (car
il n’y en a pas qu’un : langage harmonique, langage modal, etc.) s’appuyant
sur des codes conventionnels de significations (du genre : " mineur
+ lent + grave = triste " et " majeur + vif + aigu = gai ", ou
raga bhimpalashi pour l’après-midi et raga darbari pour le soir), mais
de simples expériences sensorielles (purs objets sonores selon
le mot de Pierre Schaeffer, c’est-à-dire le son écouté
pour lui-même sans chercher ni sa cause ni ce qu’il veut dire), transcendée
en expérience esthétique par l’attention ;
- une musique qui ne naisse pas d’une combinatoire comme toute la musique
traditionnelle qui ne fait que combiner un nombre restreint de notes dans l’instant
(harmonie) et dans le temps (mélodie et rythme), mais au contraire un
vaste déploiement spatio-temporel qui exploite toute la richesse de notre
faculté auditive pour nous donner à entendre des sons aussi riches
et variés que les chants de l’eau ou du vent (sans tomber non plus dans
ces travers que sont l’imitation ni le bruitisme).
C’est une révolution du même
ordre que celle qui a eu lieu quelques décennies plus tôt en peinture
et qui a conduit de la figuration à l’abstraction. Remarquons que ce
passage a été progressif, avec des étapes intermédiaires
comme l’impressionnisme, le fauvisme, le cubisme, l’abstraction géométrique,
etc., qui ont contribué à changer notre regard, le préparant
à accueillir la pure abstraction, que ce soient les éclaboussures
de Pollock, les monochromes de Klein ou les paysages abstraits de Zao Wou Ki.
De même, des étapes intermédiaires sont nécessaires
pour préparer l’avènements de pures musiques de sons tant l’emprise
des notes est forte (corrélée au langage parlé). Ces intermédiaires
sont de deux sortes :
Il y a d’une part les sons inouïs générés par des
moyens électroniques et que l’on entend de plus en plus dans des bandes
sons de films ou de publicités. Cela contribue à nous ouvrir les
oreilles. Bien sûr, des compositeurs de musiques dites contemporaines
se servent aussi de ces procédés. Le problème est que la
qualité musicale de ces pièces passent souvent au second plan
derrière leur caractère conceptuel ou anecdotique (voir les critiques
de quelques unes de ces musiques dans le livre). Il subsiste donc encore trop
souvent un écart entre bidouiller des sons et faire des musiques de sons.
Mais tout de même il y en a de plus en plus qui sont vraiment intéressantes.
Cf. notamment le site electrocd.
D’autre part il y a l’exploration de la dimension sonore des notes, voie qui
me semble souvent plus satisfaisante musicalement parlant. Cela tient d’abord
au fait que nous avons à peine commencé à nous détacher
des notes. Même si les expérimentations précédentes
nous y préparent, force est de reconnaître que peu sont prêts
pour un plus grand saut. De même qu’aucun peintre du 19e n’a imaginé
le monochrome et qu’aucun spectateur n’aurait été disposé
à l’accueillir.
Cette limite perceptive se double d’une limite technique. Certes, l’informatique
musicale a fait d’énormes progrès. Il est possible aujourd’hui
avec un simple PC de manipuler le son à un niveau très profond,
agir par exemple sur chaque composante de son spectre et en contrôler
l’évolution. Mais remarquons :
d’une part que ce n’est guère convivial,
d’autre part qu’on se contente presque toujours de manipuler des signaux périodiques
pour finir par revenir à des notes : cf. tous les synthétiseurs,
y compris les précurseurs comme le Theremin ou les ondes Martenot ;
cf. la technique de l’échantillonnage (sampling) utilisée tant
dans les musiques savantes électroacoustiques que dans les musiques djeunes
techno, où la plupart des sons retenus sont finalement des notes d’instruments
acoustiques, ou de ces instruments simulés par des synthétiseurs.
Quant à moi, considérant que les musiques de notes me sont devenues
étrangères et que les musiques de sons sont encore à naître,
je ne puis que m’inscrire dans cette transition en tentant à mon tour
l’exploration de la dimension sonore de la note.
Mon défi est de tendre vers
des musiques de sons en partant d’un instrument conçu pour fabriquer
des notes, précisément un saxophone soprano. Les raisons de ce
choix sont multiples :
1. j’aime le rapport physique que j’ai avec cet instrument, impossible
évidemment avec un ordinateur, du moins pour le moment car je ne doute
pas qu’un jour seront conçues des interfaces aussi agréables ;
certes, existent déjà des instruments à vent électroniques
(comme le Akaï EWI4000s avec synthétiseur et interface Midi), mais
on est encore loin de la relation physique que l’on peut avoir avec un instrument
purement acoustique où l’on sent directement les interactions entre les
gestes, le souffle, les vibrations de l’anche, les vibrations de l’air, les
vibrations du corps, ce qui passe dans les oreilles et qui finalement fait son
dans l’esprit ;
2. je veux faire naître des musiques dans l’instant parce que c’est
aussi mon plaisir d’improviser, le contraire donc d’un travail en différé
sur des enregistrements ;
3. je veux des musiques chargées d’énergie et pas conceptuelles
ni juste émotionnelles ;
4. je ne sais si c’est possible mais je voudrais aussi pouvoir agir simultanément
sur les trois ‘écoutants’ distingués dans mon livre, à
savoir : le corps (cf. la pratique tibétaine du chant dans le
corps), le cerveau (modification de l’état de conscience, transe),
l’esprit (dimension esthétique, extase).
Je crois possible de réaliser
l’essentiel de ce programme lorsque j’entends :
- les sons que parvient à tirer Scelsi d’instruments classiques,
- les expériences en tous genres de Stockhausen,
- les sons qui sortent des guitares électriques des Hendrix, Van
Halen, The Edge (U2), etc.,
- la pièce unique et à mon goût réussie de Stan
Getz à la fin des années 70 réalisée avec une chambre
d’échos qui montre que ce genre d’effets n’est pas réservé
à la guitare et passe aussi très bien au saxophone ; ainsi
qu’à la trompette, je m’empresse de le préciser, instrument qui
a bizarrement plus inspiré ce genre de bidouilles, probablement grâce
au génial précurseur que fut Miles Davis dans sa période
‘électrique’ des années 70-80 (lequel soit dit en passant vouait
une très grande admiration à Jimmy Hendrix), et d’autres à
sa suite comme Arve Henriksen ou Niels Peter Molvaer.
Bref, de l’énergie, des sons fabuleux tirés d’instruments à notes, et en plus, avec l’électronique, la possibilité de jouer seul et d’improviser. Quelques précisions:
la musique de Scelsi
Bien que n’étant pas le seul
à explorer le son musical (s’il fallait fixer un commencement dans la
musique classique occidentale, ce serait avec Varèse il me semble), il
est le premier à ma connaissance à le faire aussi systématiquement
et avec autant de réussite. En tout cas à mon oreille. Raison
suffisante pour que je lui accorde une place de choix.
À une époque, les années 50, où d’autres commencent
à triturer électroniquement des sons, qu’ils soient acoustiques
ou eux-mêmes produits par des moyens électroniques (par exemple
Pierre Schaeffer pour n’en citer qu’un), Scelsi choisit de ne recourir qu’à
des instruments classiques. Y compris le piano qui, au contraire des vents ou
des cordes, n’autorise aucune distorsion de la note (du moins sans préparation
comme propose de le faire John Cage, ni désaccordage comme dans certaines
pièces de Michael Levinas). Par conséquent Scelsi ne fait pas
tant une musique de sons qu’une exploration du son à l’intérieur
de la note :
" Pour lui chaque note est un son, c’est-à-dire pas simplement un
point, mais une sphère dotée de dimensions de profondeur et de
volume. Il peut et doit faire l’objet d’une fission en ses éléments
constituants. Un son est un organisme vivant, doué d’une vie infiniment
complexe et subtile. Un organisme vivant, donc avant tout doué de mouvement.
Le son vit et bouge : il oscille dans l’espace, il vibre et frémit
comme du plasma, il est doué de profondeur et d’épaisseur. "
(Harry Halbreich, notes accompagnant les œuvres orchestrales de Scelsi publiées
chez Accord).
Comment y parvient-il avec des instruments conçus pour faire des notes ?
" Cette vibration interne du son est rendue audible par des clusters, des
trilles, des trémolos, des glissandi, par diverses articulations, par
des contrastes de grain entre rugueux et lisse, mais surtout par ce vibrato
rapide et ample qui élargit la trace d’une hauteur de rayon limité
en faisceau. " (ibid.)
À cela s’ajoutent des changements d’intensités, de rythmes, de
timbres, de hauteurs (oscillations de micro-intervalles), ainsi que de riches
unissons (jusqu’à quatre octaves superposées).
S’y ajoute encore une orchestration privilégiant les graves. Ce point
mérite une explication.
Traditionnellement (j’inclus ici
sous le vocable de musiques ‘traditionnelles’ toute la musique classique, le
jazz, le rock, le folk, ainsi que presque toutes les musiques des autres pays),
les notes graves servent à donner une assise rythmique et/ou harmonique
à des mélodies qui se déploient plus haut dans le spectre ;
ou bien, si elles sont mélodiques, à exprimer la tristesse (cf.
la plupart des marches funèbres). Ce n’est évidemment aucune de
ces fonctions qui intéresse Scelsi. Je le sens plus proche des tibétains
qui recourent également à des notes extrêmement graves,
qu’elles soient produites vocalement ou par des trompes démesurément
longues.
Pour comprendre cet autre sens donné aux notes graves, il faut revenir
à la psycho-acoustique. Rappelons pour commencer que le système
auditif humain moyen est sensible à des ondes acoustiques dont les fréquences
s’échelonnent de 20 à 20 000 Hz. Pour fixer les idées,
considérons la note la plus basse et la note la plus haute du piano :
il s’agit du la0 à 27,5 Hz et du do8 à
4186 Hz. Dans l’intervalle 20-20 000 Hz, une onde de fréquence
27,5 Hz peut compter jusqu’à 10 partiels harmoniques (sans compter les
partiels inharmoniques dont le piano est bien pourvu). Tandis qu’une onde de
fréquence 4186 Hz n’en compte au maximum que 3 (précisément :
4186 / 8372 / 16744). On peut donc dire qu’une note grave contient au-dedans
d’elle un grand nombre de notes aiguës, tandis qu’une note aiguë ne
contient pratiquement qu’elle-même.
Remarquons en outre qu’une note grave existe dans une épaisseur temporelle
nécessairement plus grande qu’une note aiguë. Pour rester avec les
mêmes notes que ci-dessus, dans le la0 à 27,5 Hz
il faut à l’onde de pression 36 millisecondes pour accomplir son cycle,
tandis que 0,2 ms suffisent pour le do8 à 4186 Hz.
Tout ceci fait que les notes graves offrent beaucoup plus de possibilités
d’explorer l’intérieur du son que les notes aiguës. Fermons la parenthèse
et revenons à Scelsi.
Dans le cas du piano, instrument
à notes fixes et non tenues sur lequel les trémolos, vibratos,
micro-tons et autres glissandos ne sont pas possibles, Scelsi doit recourir
à d’autres procédés. Il fait notamment un large usage des
résonances et des répétitions.
Là encore il ne faut pas se méprendre. Il ne s’agit pas de formules
rythmiques répétitives employées soit seules pour produire
un effet quasi hypnotique (comme dans les musiques justement appelées
répétitives), soit comme assise à des mélodies (ostinato
que l’on retrouve dans de très nombreuses musiques : classique,
jazz, rock, ragas indiens, etc.). Il s’agit plutôt pour Scelsi de la manifestation
en groupes de notes séparées d’un seul et même son qui se
déploie dans un temps long. Chaque abaissement d’une touche ou d’une
série de touches est a contrario la projection dans un temps court de
ce son global. Donc la répétition, avec ou sans variations, sert
ici aussi à dévoiler l’intérieur d’un son complexe dans
une dialectique entre temps court et temps long.
Dans ses œuvres vocales, Scelsi a plus de possibilités de par la grande
flexibilité de la voix : trilles, trémolos et oscillations
microtonales comme avec les cordes et les vents ; et en plus : sons
nasaux ou gutturaux ou aspirés, bruits de souffles, etc. Tout cela permet
à la fois de s’écarter de la note (au sens de son de hauteur fixe)
et d’enrichir le son en nombreux partiels (à comparer avec les voix blanches
de certaines chanteuses classiques).
Les résultats sont très convaincants. Scelsi parvient à concevoir des musiques riches et variées, qui ne lassent pas, puissantes et pleines d’énergie, sans qu’il y ait la moindre mélodie ni harmonie, seulement en explorant le son à l’intérieur de la note. Remarquons que malgré l’insistance de Scelsi pour construire la plupart de ses pièces autour d’une seule note, cela ne sonne jamais comme un bourdon ni comme de la musique planante qui s’étire à l’ennui dans le temps. Ce n’est pas statique même si ça ne raconte pas une histoire. Toutes ses pièces contiennent une incroyable énergie, née de la dynamique de la matière sonore elle-même : " Son exploration de l’infiniment petit atteint à l’infini de la suspension du temps. Infini et éternel : la musique de Scelsi nous rapproche de l’origine de toute énergie et de toute vie. " (ibid.) L’atteindre exige un effort d’attention de la part de l’écoutant pour rester à l’écoute des objets sonores que Scelsi lui offre à entendre, sans retomber dans la projection de sens (du genre " c’est triste parce que c’est grave ") ni la perception catégorielle (du genre " ça joue faux " alors que ce sont des notes parfaitement justes mais s’écartant de microtons des notes habituelles).
les sons des guitares électriques
Tout aussi pleines d’énergie
sont les musiques de rock, quoique ne se revendiquant pas du tout de la même
source. Depuis Hendrix, de nombreux guitaristes parviennent à tirer de
leurs instruments des sons incroyables qui n’ont plus rien de commun avec des
notes de guitares. Comment font-ils sachant que leurs instruments sont tout
de même conçus au départ pour sortir des notes bien précises
(cf. aussi le fait que presque tous les manches sont frettés) ?
Le secret, connu de tous les guitaristes mais guère des autres musiciens
(donc pas de moi il y a encore un an et demi!), est dans l’électronique.
Il faut savoir qu’une guitare dite électrique, si elle n’est pas branchée,
ne produit pratiquement aucun son audible du fait qu’elle n’a pas de caisse
de résonance. Donc pour parvenir à entendre quelque chose sans
rester les oreilles collées aux cordes, il faut capter leurs vibrations
(avec des micros spéciaux appelés pickups), les amplifier et les
diffuser dans des haut-parleurs. Là où ça devient intéressant,
c’est que comme la guitare électrique n’a pas de son propre, il faut
lui en fabriquer un. La question de la fidélité ne se pose donc
pas, et la distorsion, phénomène indésirable dans la captation
et la reproduction de n’importe quelle autre source sonore, devient au contraire
ici recherchée puisqu’elle contribue à la fabrication de ce son.
Acoustiquement parlant, une distorsion correspond à un enrichissement
du son en partiels, ce qui lui donne un grain particulier, une personnalité
donc. Micros, amplis et haut-parleurs qui constituent la chaîne du son
n’ont donc rien de commun avec ceux des studios d’enregistrement ni avec les
chaînes hi-fi. Tous les éléments peuvent être poussés
jusqu’au point de saturation où le signal subit de notables déformations.
Déformations qui sont justement recherchées pour faire son son.
La chaîne du
son ne s’arrête pas là. Entre le micro et l’ampli il est possible
d’intercaler des boîtiers électroniques qui modifient encore le
son de toutes sortes de manières, offrant véritablement la possibilité
de le sculpter. Ces effets sont habituellement répartis en quatre catégories
selon leur mode d’action (des précisions sur chaque effet dans l’annexe 1) :
1. effets de gain, qui agissent sur le niveau du signal : distorsion, fuzz,
overdrive, compression, circuits d’élimination du bruit (noise gates)…
2. effets de tonalité qui modifient la couleur du son : égaliseur,
wah-wah…
3. effets de modulation qui transforment le son : chorus, flanger,
phaser, trémolo, pitch shifter, octave divider…
4. effets d’ambiance qui récréent un espace acoustique :
délai (ou écho) et réverbération.
Tous ces effets peuvent être
enchaînés les uns aux autres. L’ordre a évidemment de l’importance
sur le résultat final. Même si tout est possible a priori, des
raisons d’ordre acoustique incitent à placer habituellement en début
de chaîne les effets de gain et de tonalité qui conditionnent le
signal, suivis des effets de modulation qui créent des nouveaux sons,
pour finir avec le délai et la réverb qui recréent une
ambiance. Mais la logique est une chose, l’art en est une autre, et au final
seuls l’expérimentation et le goût permettant de juger,
Chaque effet de la chaîne peut être activé ou désactivé
en cours même de jeu par des interrupteurs au pied. Chaque effet possède
plusieurs paramètres de réglage dont certains peuvent être
contrôlés pendant le jeu en les assignant à une pédale
d’expression. Cela reste évidemment assez grossier par rapport à
ce qu’il est possible de faire en différé avec un ordinateur mais
c’est inappréciable de pouvoir ainsi travailler le son en direct.
Avec quelques adaptations, ces outils peuvent servir à sculpter le son
de n’importe quel instrument ou même de la voix. Un instrument à
notes monodique comme un saxophone peut, en passant à travers une telle
chaîne de traitement du signal, prendre l’épaisseur d’un orchestre
ou donner à entendre des sons inouïs impossibles à produire
autrement.
À partir de là plusieurs chemins s’ouvrent : se servir de
ces outils pour faire les habituelles musiques de notes, ce que restent au fond
toutes les musiques de rock en-dehors de quelques solos stratosphériques ;
ou bien s’en servir comme d’une loupe pour explorer toute la richesse sonore
contenue dans la note, " à la Scelsi " dirai-je.
acoustique
En tant qu’instrument
à vent, le saxophone offre beaucoup de possibilités de travailler
le son avant toute intervention de l’électronique :
- jeu sur les harmoniques de l’extrême grave ;
- multiphoniques (émission simultanée de plusieurs notes)
- vibrato (variation rapide de hauteur : voir annexe 2)
et trémolo (variation rapide d’intensité) ;
- jeu très rapide, de sorte qu’on n’entend plus une mélodie
mais plutôt un tissu sonore ;
- trilles très rapides qui confèrent aux notes une épaisseur
dans la dimension de hauteur, éventuellement au quart de ton voire moins
(proche alors du flattement) ;
- microtons c'est-à-dire 1/4, 1/8, etc.
- detune c’est-à-dire jeu en-dehors du ton (qui n’est pas jouer
‘faux’ ! c’est ‘juste’ mais à une hauteur non conventionnelle) ;
dans le cas où cette note en-dehors du ton est produite par un effet
électronique, celle-ci vient se superposer à l’original et il
en résulte un épaississement du son dans la dimension de hauteur ;
tandis que dans un jeu purement acoustique, cela produit seulement une excursion
hors de la tonalité ;
- notes tenues longuement sans variation ou jeu répétitif
provoquant une satiété sémantique (voir explications dans
le livre) pour susciter une écoute créative, par exemple faire
entendre des notes fantômes ou des rythmes absents du jeu, selon des particularités
propres à chacun (à ne pas confondre avec des illusions auditives
qui révèlent des mécanismes cachés de notre perception
et sont valables pour tous) ;
- jeu à la limite de l’audible afin de brouiller les notions de
mélodie et de tonalité, obligeant là aussi à une
écoute créative ;
- ajout de bruits de souffles, grognements et autres bruits de clés ;
- etc.
En employant ce genre de procédés avec tous les instruments d’un
orchestre, Scelsi parvient à créer des musiques très variées.
C’est évidemment beaucoup plus difficile de ne pas être lassant
lorsqu’on joue seul. C’est là l’intérêt de recourir à
des effets électroniques.
Les saxophonistes désireux d'en savoir plus peuvent consulter le document doigtés du saxophone soprano, trilles, microtons, multiphoniques.
effets électroniques
Je
rappelle que mon but est d'improviser des musiques de sons en partant d'un instrument
conçu pour fabriquer des notes, précisément un saxophone
soprano. L'adjonction de dispositifs électroniques de traitement du signal
acoustique généré par le saxophone ouvre de nouveaux et
vastes espaces sonores aux possibilités déjà riches de
l'instrument seul. Ces dispositifs ne sont donc pas là pour palier un
manque d'imagination mais au contraire pour la stimuler en donnant à
entendre des sons inouïs difficiles voire impossibles à produire
par des moyens purement acoustiques. Il s'agit notamment (ceci sera précisé
dans un livre en préparation):
- musicalement, de créer seul et en direct des nappes de sons, c'est-à-dire
des sons dans des sons dans des sons, dans lesquelles l'écoutant puisse
se promener à sa guise en déplaçant/focalisant son attention
;
- pratiquement, de modifier le son du saxophone (ou de tout autre instrument
acoustique, y compris la voix) avec deux grandes catégories d'effets
:
1. un épaississement du son dans le micro-temps de la perception immédiate
de l'instant, et ce dans au moins trois directions : timbre, temps, polyphonie
;
2. une évolution et transformation du son dans le temps de la mémoire
à court terme, là encore dans plusieurs directions : timbre, rythme,
sensation d'accélération et de décélération,
déplacement dans l'espace (quoique laissé de côté
pour le moment pour des raisons techniques).
Ceci doit se faire en direct puisque je privilégie l'improvisation, avec
bien évidemment la possibilité de contrôler en permanence
ces effets via des pédales. Il faut donc constituer une chaîne
de traitement du signal qui commence par un micro captant l'instrument, se poursuit
par un ou plusieurs dispositifs qui transforment le son, et s'achève
dans des enceintes acoustiques pour une écoute en direct. C'est une chaîne
très différente des chaînes de sonorisation et des chaînes
d'enregistrement où la fidélité et l'ambiance compte par-dessus
tout. Il y a en gros trois façons de faire :
1. chaîne de traitement informatique
La puissance du moindre PC est aujourd'hui telle qu'on peut lui demander de
traiter en direct pratiquement n'importe quelle chaîne d'effets sonores,
que ce soit en série ou en parallèle. Un logiciel tel que GuitarRig
de Native Instruments fait cela très bien.
Les difficultés sont ailleurs. L'une est que les principaux systèmes
d'exploitation du marché ne sont pas vraiment conçus pour faire
du temps réel. Ils gèrent simultanément un grand nombre
de processus (la plupart dont on n'a pas idée, par exemple le sous-programme
qui surveille l'activité de l'ordinateur pour mettre l'écran en
veille au bout de cinq ou dix minutes d'inaction). Ils ne consacrent donc qu'une
partie de leur temps à la tâche principale que l'on exige d'eux.
Pour rendre ce traitement discontinu compatible avec un flux sonore qui lui
est continu, ils recourent à ce qu'on appelle des mémoires tampons
(buffers) en entrée et en sortie. Cela a pour conséquence d'introduire
un délai (appelé latence) entre le moment où le son est
émis et celui où il sort par les haut-parleurs. Si, pour réduire
la latence, on règle les buffers sur une valeur très basse, le
flux risque de devenir discontinu : les buffers se vidant plus vite qu'ils ne
se remplissent on entend des clics. Si au l'augmente trop, plus de clics mais
le délai devient audible, en quelque sorte le temps que la mémoire
se remplisse avant de se vider. Ce n'est pas gênant pour un travail en
différé (comme le traitement sur un enregistrement) mais c'est
tout à fait incompatible avec un jeu en temps réel. Pour palier
ce problème, il faut recourir à des drivers spéciaux (comme
ASIO) et des cartes son qui les supportent.
Une autre problème vient aussi des cartes son. La plupart sont munies
de ports mini-jacks qui ne supportent pas les manipulations répétées
et qui en outre ne correspondent pas aux standards professionnels (prises XLR
ou jack 6,35 mm).
Pour tout ça il faut une carte son ad hoc, par exemple parmi les moins
chères : Alesis io/2 (utilise le port USB), Edirol UA-25 (USB) ou sa
variante pour prise Firewire FA-66.
Quand on arrive à faire marcher l'ensemble (l'ordinateur, la carte son
avec son driver, le logiciel de traitement du son) sans plantage, reste un dernier
problème : le pilotage à la souris n'est pas des plus pratiques,
surtout pendant qu'on a les mains occupées à manipuler un instrument
de musique. Là encore ce n'est pas gênant pour du traitement différé,
beaucoup plus pour du direct. Certes il est possible d'ajouter un pédalier
de contrôle Midi, mais ça fait une couche de plus qu'il va falloir
payer, configurer et faire marcher avec le reste…
Tout problème ayant une solution pour peu qu'il y ait un marché,
diverses sociétés proposent des packs complets pour guitaristes.
Par exemple la GuitarBox de M-audio qui comprend l'interface BlackBox (avec,
entre autres, entrées pour guitare et micro dynamique, et interface USB),
le logiciel de production audio ProTools, un pack de plug-in d'effets, et un
pédalier de contrôle et d'expression, le tout pour environ 500€.
Citons aussi GuitarRig de Native Instruments, proposé maintenant dans
sa version 4 pour un prix semblable avec le logiciel du même nom (très
riche et très convivial) et l'interface audio RigKontrol (avec entrées
instruments, sorties audio, connexion USB, pédales de contrôle
et d'expression). C'est du même ordre de prix qu'un très bon pédalier
multieffets, mais cela ne comprend pas évidemment l'ordinateur, ni de
garantie en cas de plantage…
2. les outils de l'ingénieur du son
Exemple de configuration :
- un ou deux micros (pour deux instruments ou bien pour constituer avec un seul
deux chaînes de traitement en parallèle) qui rentrent dans une
console de mixage ;
- entrée et sortie Aux du mixer reliées à un processeur
d'effets ;
- le signal traité (wet sound) est mixé avec l'original (dry sound)
et le tout envoyé dans un ampli.
C'est sans nul doute la chaîne qui pose le moins de problèmes de
compatibilité : on branche et, normalement, ça marche. C'est aussi
celle qui offre la meilleure qualité sonore (si l'on y met le prix évidemment
!). Mais ce ne sont pas des avantages suffisants pour en faire la meilleure
solution.
D'une part le nombre d'effets qu'il est possible de chaîner est plus limité
que par voie informatique ou celle de boîtiers pour guitare électrique
(à budget équivalent s'entend, disons de l'ordre de 300 à
500€ hors micro et sono).
D'autre part le choix est difficile tellement il est vaste, entre un Behringer
FEX800 à moins de 50€ et un Lexicon PCM96 à près de
3000€ !
Enfin, les réglages ne sont pas des plus conviviaux, ces appareils étant
faits pour être manipulés par des ingénieurs du son prenant
leur temps et pas par des musiciens pendant qu'ils jouent.
3. les boîtiers d'effets pour guitare
Il est évident que c'est pour la guitare électrique plus que pour
les studios d'enregistrement qu'ont été conçus des boîtiers
d'effets offrant de riches possibilités de travail du son tout en étant
faciles à utiliser sur scène.
Le problème est qu'ils ne marchent pas avec des micros classiques. Question
de niveau du signal et d'impédance : celle d'un pickup de guitare électrique
tourne autour de 20 000 ohms quand un micro voix ou instrument fait environ
200 ohms, un écart d'un facteur 100 !
Problème d'entrée et aussi problème de sortie : les boîtiers
d'effets sont conçus pour alimenter directement des ampli de guitare
qui ont une impédance d'entrée de 200 000 à un million
d'ohms quand les entrées d'ampli hi-fi ou de sono font entre 10 000 et
20 000 ohms.
La solution la plus simple à ce dernier problème est d'utiliser
un boîtier multieffets qui dispose d'une sortie réglable pour alimenter
soit un casque, soit un ampli normal, soit un ampli guitare.
Pour résoudre le problème d'entrée, il faut savoir qu'il
est toujours possible de brancher une sortie basse impédance sur une
entrée haute impédance, alors que l'inverse n'est pas vrai. Donc
il ne reste qu'à rehausser le niveau du signal avec un préampli
approprié. De combien ? cela dépend évidemment du micro
et de la puissance de l'instrument. 20db me semble un minimum. Pour ce faire
on peut soit intercaler un préampli entre le micro et le multieffets
ne disposant que d'une entrée haute impédance, soit, c'est plus
simple, préférer un multieffets déjà muni d'un préampli
(c'est le cas notamment des multieffets pour guitares acoustiques car les micros
piezo de ces guitares n'ont rien à voir avec les pickups des guitares
électriques), voire pour certains d'une entrée micro dynamique.
Importante aussi est la présence de pédales de contrôle
et d'expression assignables pour contrôler en direct l'activité
et la valeur d'un paramètre particulier d'un certain effet sélectionné
à l'avance.
conclusion
L'autonomie et le jeu en direct ayant pour moi aujourd'hui plus d'importance
que les capacités de traitement en différé quasi illimitées
offertes par l'informatique, ma préférence va à la troisième
solution. Mon dispositif est donc centré sur un multieffets pour guitare,
en l'ocurrence un Boss GT8. Maintenant, un peu plus d'un an après mes
premières expérimentations de traitement du son du saxophone avec
cet appareil:
- ma quête musicale s'est précisée,
- mon jeu au saxophone s'est modifié,
- mon écoute s'est affinée,
- ma compréhension des effets s'est approfondie,
- d'autres besoins sont apparus comme le jeu avec des boucles qui ont conduit
à l'adjonction de nouveaux appareils.
Tout ceci ne remet pas en cause mon choix de processeurs d'effets dédiés
et au contraire le confirme. À
ce jour (novembre 2009) la chaîne de traitement qui suit mon saxophone
soprano Selmer MarkVI est constituée, dans cet ordre :
1. micros instrument Shure PG57* et Shure 517SB
2. multieffets pour guitare Boss GT8*
3. générateur de boucles Boss RC50*
4. reconditionneur de signal BBE sonic maximizer 362**
5. égaliseur et antilarsen Behringer DEQ1024**
* ces matériels
proviennent du magasin Musical
Box à Digne (Alpes de Haute Provence); merci à Sylvie Marusic
pour son aide et son sens du service
** ces matériels ont été commandés sur Thomann
La sortie numérique du DEQ est utilisée pour l'enregistrement direct sur ordinateur via une interface audio Phonic Digitrack ; et les sorties analogiques alimentent le système de diffusion constitué chez moi : d'un ampli John Shearne Phase2, d'enceintes BC-Acoustique Araxe (première génération pour les connaisseurs) complétées par un caisson de basses Rel Quake.
N'ayant pas trouvé beaucoup d'aide dans mon cheminement,
je suis quant à moi désireux de donner à tous ceux que
la création de telles musiques intéresse un coup de pouce pour
constituer, brancher, régler, programmer et optimiser ce genre de dispositif.
Je mets donc à disposition ce document (670ko) dont le sommaire détaillé
est donné ci-après:
Attention, il ne vise pas à se substituer aux manuels des différents appareils et on ne saurait comprendre ces développements sans les avoir lus et assimilés. Ce n'est pas non plus un cours d'acoustique pour débutants et l'on n'y trouvera pas de définition des fréquences harmoniques, de l'alimentation fantôme, de la réverbération et autres notions de base. Tout ça, ce sont des pré-requis indispensables pour comprendre ce que font ces appareils et pouvoir les manipuler. Précisément, il s'agit dans ce document : d'une part d'éclaircir des particularités de leur fonctionnement que les manuels ne traitent pas, ou insuffisamment ; d'autre part de mettre au point les programmes et les réglages dont j'ai besoin pour 'sculpter' mon son et faire la musique dont j'ai envie. Ceci évidemment par rapport à mes objectifs musicaux qui sont des musiques de sons improvisées, à mon instrument et mes techniques de jeu, et enfin à mon dispositif d'ensemble de traitement du son. Libre à chacun de les adapter à son instrument et ses besoins musicaux (y compris d'ailleurs pour faire des musiques de notes...).
musiques de sons électroacoustiques avec saxophones et processeurs d’effets
disposition et réglage des appareils
de traitement du signal acoustique généré par le
saxophone
prise du son et micros
prise de son des saxophones
étendue et fréquences
choix du micro
impédances et niveaux
réglages
annexe: la sensibilité des micros
branchements
liaison GT8-RC50
branchements du BBE et du DEQ
réglage des niveaux
programmation du multieffets Boss GT8
réglages globaux
à propos des pédales
étude des effets
patches
compatibilité des effets avec les
différentes techniques de jeu au saxophone
un programme polyvalent
programmation du loop-station Boss RC50
fonctions de base
réglages globaux du RC50
patches
réglages du Behringer DEQ1024
remarque préliminaires
égaliseur: usages et outils
réduction du larsen
corrections acoustiques
égalisation du saxophone
sculpter le son
réglages du BBE sonic maximizer 362
principes
low contour et process
réglages
enregistrer
matériel
problèmes avec certaines interfaces
audio USB
La liste alphabétique suivante décrit les principaux effets utilisés tant par les guitaristes que par les ingénieurs du son. Elle n’est pas exhaustive et certaines définitions peuvent prêter à discussion sachant que chaque fabricant a ses recettes. Disons que ce sont les grands principes sur lesquels la majorité s’accorde. J’ai laissé certains noms en anglais parce que c’est sous ces dénominations qu’on les trouve le plus souvent.
boucle
voir loop
chorus
Lorsque deux instruments jouent à l’unisson, le son de l’ensemble n’est
pas seulement plus fort que lorsqu’un seul joue, il est surtout plus épais
à cause d’innombrables, infimes et variables décalages de temps
et de hauteurs. Le chorus tente de recréer ces phénomènes
électroniquement pour faire sonner un instrument unique comme deux. L’effet
principal consiste à ajouter au signal original un signal identique légèrement
décalé environ de 10 à 35 millisecondes. Cet écart
n’est pas fixe et varie lentement. Les principaux paramètres de réglage
concernent donc l’amplitude de ce décalage (depth, de 0 à 50 ms
pour les plus étendus) et la fréquence à laquelle il fluctue
(rate, entre 0 et 20 Hz). Pour accentuer l’effet, certains chorus ajoutent
une légère variation de hauteur (pitch shift), elle aussi modulée.
compresseur
Comme son nom l’indique, le compresseur comprime dans une proportion réglable
(ratio signal/effect) l’intensité des signaux qui franchissent un seuil
lui aussi réglable (threshold), après quoi le volume global est
rehaussé pour ne pas donner l’impression d’une baisse d’intensité.
Le résultat est un aplatissement de la dynamique du signal par diminution
des signaux forts et augmentation des signaux faibles. Du coup la tenue de la
note paraît augmentée (sustain).
délai
Cet effet mériterait plutôt le nom d’écho car c’est bien
cela qu’il produit au moyen d’un délai fixe ajustable entre 100 ms
et 2 s (voire plus). Le nombre de répétitions (feedback)
est lui aussi ajustable entre un seul et un nombre infini.
Remarque : pour comprendre la différence entre un délai court
qui ne produit pas d’écho comme dans un chorus et un délai long
qui produit un écho comme ici, voir annexe 2.
detune
voir pitch shifter
distorsion
Acoustiquement, la distorsion est un effet de volume, mais pour la perception
c’est un effet de timbre. Le son acquiert du grain par ajout de partiels, lesquels
sont engendrés par une distorsion du signal. À l’origine elle
était obtenu en saturant l’ampli (overdrive). Il suffit pour cela de
lui envoyer un signal si fort qu’il n’est plus capable de l’amplifier sans le
déformer. Aujourd’hui la distorsion peut aussi être obtenue en
amont de l’ampli par des boîtiers d’effets appelés fuzz, overdrive
ou simplement distorsion. Cela permet un bien meilleur contrôle du son,
et cela permet aussi d’épaissir le son tout en restant à des niveaux
d’intensité moyens voire faibles.
écho
voir délai
égalisation (equalizer)
L’égalisation ne change pas la nature du son, elle modifie seulement
la manière dont il est entendu, la présence en quelque sorte ou
la sonorité (métallique, douce, etc.), en rehaussant ou diminuant
l’intensité de certaines bandes de fréquences. Dans un égaliseur
graphique, le spectre audible (20-20 000 Hz) est découpé
en un certain nombre de bandes fixes, chacune munie d’une glissière de
réglage de l’intensité. Lorsque toutes les bandes sont réglées,
les boutons des potentiomètres dessinent un graphe, d’où le nom
de l’appareil.
Moins courant est l’égaliseur paramétrique. Il fonctionne à
peu près de la même manière sauf que les fréquences
de coupure sont elles-mêmes ajustables.
flanger
Voilà un autre effet de délai proche du chorus mais avec un délai
plus court (jusqu’à 20 ms). Ce délai est aussi modulé.
Selon les réglages, le résultat peut être proche du chorus
(parfois les deux effets sont associés dans un même appareil) ou
tout autre, ressemblant par exemple au bruit d’un avion à réaction
au décollage.
fuzz
voir distorsion
harmoniseur
voir pitch shifter
haut-parleur tournant (ou
cabine Leslie)
Lorsqu’on fait tourner un haut-parleur sur son axe, il sème le son dans
toutes les directions, d’où des phénomènes complexes de
retards, de variations de phases, d’interférences. Conçu initialement
pour l’orgue, ce dispositif a rapidement été adopté par
les guitaristes. Puis est arrivée la numérisation qui a permis
de faire rentrer cet appareil de la taille d’un réfrigérateur
dans un minuscule boîtier.
loop
Une phrase de quelques secondes à plusieurs minutes est enregistrée
puis rejouée en boucle. Le jeu continue au-dessus de cette phrase. Avec
certains appareils il est même possible de se réenregistrer (overdub),
et ainsi de suite jusqu’à créer une vaste polyphonie orchestrale
à partir d’un seul instrument.
noise gate (porte de bruit)
ou noise suppressor (réducteur de bruit)
Les noise gates ou portes de bruit sont des dispositifs conçus pour ne
laisser passer le signal que s’il dépasse un certain seuil (réglable
évidemment). Une fois ouvertes, elles laissent passer même les
signaux les plus faibles, puis se referment au bout d’un certain temps (ajustable)
pour ne plus rien laisser passer si aucun signal dépassant le seuil n’est
détecté. Le but est de supprimer les bruits indésirables
lorsqu’on ne joue pas. Il faut seulement prendre garde à bien régler
le seuil pour que chemin faisant on ne perde pas les phases de jeu les plus
délicates.
Certains de ces appareils comprennent en outre un effet agissant sur l’attaque,
la rendant par exemple plus progressive, avec un son qui gonfle.
octave divider
Pitch shifter (voir ce mot) qui ajoute des notes une ou deux octaves au-dessus
ou au-dessous de la note jouée.
overdrive
voir distorsion
phaser
Un signal identique mais légèrement déphasé est
mélangé au signal original. D’où des interférences
qui donnent au son des caractéristiques très particulières.
Selon le réglage du déphasage, cela va d’un son ondulant à
des bruits d’avion proches de ceux produits par un flanger.
pitch shifter
C’est le terme générique pour tout effet qui modifie la hauteur
du son. Cela ne marche évidemment qu’avec des notes bien définies,
de surcroît jouées seules et pas en accords. Il y a trois manières
de faire qui donnent des résultats très différents :
- par intervalles très faibles mesurés en cent (centième
de demi-ton), appelé aussi detune ;
- par intervalles de demi-tons pouvant aller de deux octaves au-dessus
à deux octaves au-dessous de la note jouée ;
- l’harmoniseur quant à lui ajoute des notes cohérentes avec
la tonalité dans laquelle on joue. Explication :
Si l’on règle un pitch shifter classique sur +4 demi-tons par exemple,
chaque note sera accompagnée d’une note située une tierce majeure
au-dessus. Le problème saute au oreilles lorsqu’on monte une gamme :
certaines de ces notes ajoutées tombent en-dehors (pour une gamme majeure
en do, do donne mi mais ré donne fa#). L’harmoniseur permet, une fois
précisée la tonalité, de faire entendre des intervalles
rentrant dans la gamme (do donne toujours mi tandis que ré donne cette
fois fa).
réverbération
(reverb)
C’est une simulation d’ambiance qui reproduit le comportement du son dans un
environnement réel, avec les réflexions multiples sur les objets
et les murs tenant compte de la nature des matériaux qui absorbent et
réfléchissent de manière inégale les différentes
fréquences. Les reverb les plus simples ne comprennent qu’une sélection
limitée d’ambiances, du genre : room / hall / arena. Les plus complexes,
plutôt destinées aux ingénieurs du son, gèrent beaucoup
plus d’ambiances, chacune comportant une dizaine de paramètres de réglage.
trémolo
Variation rapide et régulière de l’intensité. Les paramètres
sont bien évidemment l’amplitude de cette variation et la vitesse.
wah-wah
C’est un filtre d’égalisation avec une fréquence variable qui
balaie la région 500-2000 Hz. Il est habituellement actionné
par une pédale (il existe une variante qui permet de se passer de pédale ;
appelée auto-wah, elle réagit à la dynamique du jeu, c’est-à-dire
à l’intensité des attaques). Lorsque la pédale se déplace,
le volume de certaines fréquences est rehaussé et celui d’autres
atténué. Le cycle complet de déplacement de la pédale
produit un wah-wah caractéristique.
vibrato
C’est une variation périodique de la fréquence (à ne pas confondre avec le trémolo qui est une variation périodique de l’intensité). Le vibrato est perçu comme une variation périodique de hauteur s’il n’est pas trop rapide. Au-delà de 6 vibrations par seconde, il n’est plus perçu comme un changement de hauteur mais comme une qualité nouvelle du son.
écho
Deux sons séparés de
moins de 70 millisecondes (en moyenne pour la plupart des gens) sont entendus
comme un seul, tandis que séparés de plus de 70 ms ils sont
entendus comme séparés. Étant précisé qu’il
s’agit de signaux acoustiques similaires car pour des signaux courts ayant des
formes d’onde très différentes, la capacité de discrimination
peut descendre à 2 ms. Dans le contexte musical où je me
situe ici, retenons qu’au-dessus de 70 ms de délai on entend un
écho et au-dessous un seul son plus épais.
Remarquons que toute chaîne de traitement du signal telle que je l’envisage
ici introduit un délai entre le son direct et celui qui sort des haut-parleurs,
que le traitement soit analogique ou numérique, par DSP dédié
ou par voie logicielle. Il convient donc que ce délai, appelé
latence, reste court pour ne pas introduire d’écho systématique,
non désiré et incompressible.
Remarquons par ailleurs que le saxophone produit généralement
des sons qui durent, ce qui fait que le son traité vient recouvrir le
son direct qui continue. D’où possibilité d’interférences
et autres battements, d’autant plus prononcés que le jeu comporte du
vibrato, que la prise de son est modifiée (déplacement de l’instrument
par rapport au micro), ou qu’il est fait usage d’effets tels que phaser ou detune.
Phénomènes d’autant plus complexes que sont en outre employés
des effets d’écho (délai et reverb) et que le signal subit des
traitements qui en modifient le spectre (distorsion, égalisation, etc.,
d’où interférences entre certains partiels et pas d’autres), et
enfin qu’il y a feedback (le son émis par les haut-parleurs est repris
par le micro et réinjecté dans la chaîne de traitement).
Le résultat étant imprévisible, il n’y a qu’une écoute
attentive qui permette à l’instrumentiste de jouer créativement
avec ce qui naît dans l’instant pour que le résultat soit musical.
timbre
Notre système de perception
auditif a une nette propension à attribuer une seule hauteur à
une collection de sons dont les fréquences sont des multiples entiers
d’une fréquence de base, même si cette fréquence et certains
de ses multiples sont absents (phénomène dit de hauteur liée
à la périodicité), même si avec de l’attention il
est possible d’entendre séparément le fondamental et quelques
harmoniques (jusqu’au troisième), même si les multiples ne sont
pas tout à fait entiers (partiels inharmoniques).
C’est pour cela que l’ajout de partiels est généralement perçu
comme un épaississement du son et pas comme un ajout de nouvelles notes.
C’est ce que font notamment les effets de distorsion.
Ce phénomène explique aussi l’importance des accords parfaits
(dominante-tierce majeure-quinte comme do-mi-sol) qui crée une note fondamentale
deux octaves au-dessous de la dominante (voir livre), ou des power-chords du
rock (dominante-quinte) qui créent un fondamental une octave plus bas.
Donc jouer successivement avec un instrument monodique comme le saxophone deux
notes telles que do médium et sol aigu peut être considéré
comme une exploration du do grave.